Le pape interpelle les défenseurs des « racines chrétiennes » de l’Europe

Date d'inscription : 01/09/2021 Localisation : France

Le pape interpelle les défenseurs des « racines chrétiennes » de l’Europe

Lors d’une rencontre œcuménique pendant son voyage en Slovaquie, le pape François a mis en garde contre plusieurs écueils notamment la volonté de préserver l’héritage chrétien de l’Europe sans annoncer le Christ et chercher l’unité.

Le pape interpelle les défenseurs des « racines chrétiennes » de l’Europe Pape_slovaquie_2

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Le pape a entamé le 12 septembre 2021 un voyage de 4 jours en Hongrie (ici)
puis en Slovaquie. - SEAN GALLUP / GETTY IMAGES EUROPE / GETTY IMAGES VIA AFP

« Il est beau, mais en même temps difficile, de vivre la foi de manière libre », a reconnu le pape lors de la rencontre œcuménique organisée dimanche 12 septembre à l’occasion de son voyage en Slovaquie après un passage par la Hongrie. « Il y a en effet la tentation de retourner à l'esclavage, certes pas à un régime, mais à un esclavage encore pire, l’esclavage intérieur. »

Cette tentation n’est pas nouvelle, souligne le pape. Elle existait déjà au sein du peuple d’Israël qui une fois libéré par le Seigneur des Egyptiens, vient presque à regretter le temps de l’esclavage où au moins, il était facile de se nourrir comme il l’a souligné dans un autre discours le 13 septembre en Slovaquie. Et surtout, le pape François reprend ici l’épisode du « Grand inquisiteur » dans Les frères Karamazov de Dostoïevsky, qui reproche au Christ revenu secrètement sur terre d’avoir laissé à l’homme la liberté alors qu’« un peu de pain et une sécurité suffisent ». Le Saint père insiste : « Aidons-nous à ne pas tomber dans le piège de se contenter de pain et de rien d’autre. Car ce risque survient lorsque la situation se normalise, lorsque nous nous sommes établis et que nous nous installons dans le but de mener une vie tranquille ». Le pape invite à viser « ‘’la liberté que nous avons dans le Christ Jésus’’ ( Gal 2, 4), ‘’sa vérité qui nous libère‘’ (cf. Jn 8, 32) », et non pas « l'obtention d'espace et de privilèges. »

Réveil délicat du christianisme en Europe

Le pape a ainsi voulu remuer tous les chrétiens d’Europe. « Ici, au cœur de l’Europe, on en vient à se demander: nous chrétiens, n’avons-nous pas un peu perdu l’ardeur de l’annonce et la prophétie du témoignage ? Est-ce la Vérité de l’Evangile qui nous rend libres, ou bien nous sentons-nous libres lorsque nous nous dégageons des zones de confort qui nous permettent de nous gérer et d’avancer sereinement sans contrecoups particuliers ? ».

Interpellant ceux qui défendent l’héritage chrétien de l’Europe, le pape a déclaré : « Par ailleurs, comment pouvons-nous souhaiter une Europe qui retrouve ses racines chrétiennes si nous sommes nous-mêmes les premiers déracinés de la pleine communion ? Comment pouvons-nous rêver d’une Europe libre d’idéologies si nous n’avons pas la liberté de faire passer la liberté de Jésus avant les nécessités des différents groupes de croyants ? Il est difficile d’exiger une Europe davantage fécondée par l’Évangile sans se préoccuper du fait que nous sommes encore divisés entre nous sur le continent et sans prendre soin les uns des autres. Des calculs de convenance, des raisons historiques et des liens politiques ne peuvent pas être des obstacles inébranlables sur notre chemin ». Exhortant à davantage d’œcuménisme, a imploré les saints Cyrille et Méthode, « précurseurs » en la matière, pour qu’ils aident « à nous prodiguer pour une réconciliation des diversités dans l’Esprit Saint ».

Mêler la contemplation et l’action

Pour répandre l’Evangile et faire jaillir la liberté et l’unité dans cette Europe de plus en plus déchristianisée, le pape a donné quelques conseils. D’abord, cultiver la contemplation, « caractère distinctif des peuples slaves […] qui à partir d’une foi expérimentale, va au-delà des conceptualisations philosophiques et même théologiques et sait accueillir le mystère. Aidez-vous à cultiver cette tradition spirituelle dont l’Europe a tant besoin: l’Occident religieux en particulier en a soif, pour retrouver la beauté de l’adoration de Dieu et l’importance de ne pas concevoir avant tout la communauté de foi sur la base d’une efficacité programmatique et fonctionnelle ».

En plus de la contemplation, le pape a exhorté à l’action. « L’unité ne s’obtient pas tant avec de bonnes intentions ni par l’adhésion à quelques valeurs communes, mais en faisant quelque chose ensemble pour ceux qui nous rapprochent davantage du Seigneur. Qui sont-ils? Ce sont les pauvres parce que Jésus est présent en eux (cf. Mt 25, 40). Partager la charité ouvre des horizons plus larges et aide à marcher plus vite, en surmontant les préjugés et les malentendus ». Et le Saint-Père de conclure : « Ce sera un signe plus évocateur que bien des mots, qui aidera la société civile à comprendre, surtout en cette période difficile, que ce n'est qu'en étant du côté des plus faibles que nous sortirons vraiment tous ensemble de la pandémie. »

Camille Lecuit

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