Un jeune retraitant courageux :
Bienheureux François Castello :
Né le 19 avril 1914.
Fusillé pour sa foi chrétienne
le 29 septembre 1936.
Béatifié le 11 mars 2001.
Fêté dans l’Eglise le 22 septembre.
Une vie droite et une mort exemplaire
Francisco Castelló Aleu est le premier retraitant de l’Oeuvre des Exercices Paroissiaux dont la sainteté ait été proclamé officiellement.
Né à Alicante (Espagne) le 19 avril 1914, orphelin de père et de mère à l’âge de 15 ans, il se met alors sous la protection de la Vierge Marie. Après ses études secondaires, il obtint la licence en chimie à l’Université de Barcelone. Dans cette ville, il fait les Exercices de St Ignace sous la conduite d’un Père Jésuite, le Père Galan, dans le cadre de l’Oeuvre des Exercices Paroissiaux pour hommes, fondée par le Père Vallet en 1922. En 1935, il va exercer sa profession de chimiste à Lérida. Là, il se consacre généreusement à propager cette Œuvre et organise des retraites au Séminaire pendant les vacances scolaires.
En 1936,la révolution éclate alors qu’il fait son service militaire. Un jour qu’il a mission de garder la station émettrice de radio, il s’oppose à un officier qui veut s’en emparer. Arrêté le lendemain suite à un renversement de situation, Francisco est transféré le 12 septembre 1936 à la prison civile. Il n’a pas été possible de reconstituer les faits de la journée mouvementée du 18 juillet. D’autre part, on a trouvé dans son bureau, à l’entreprise où il travaille, une grammaire allemande et une autre italienne. Francisco est alors appelé à comparaître devant un tribunal populaire sous l’inculpation de «fascisme».
Voici le dialogue qui s’engage entre lui et le président du tribunal au cours de l’audience.
Le Président du tribunal l’interroge :
- Es-tu fasciste, toi ?
- Je ne le suis pas et je n’ai appartenu à aucun parti politique.
- Tes livres sont fascistes : un allemand, un autre italien.
- Mes grammaires italienne et allemande me servent à me perfectionner dans ces deux langues qui me sont nécessaires pour mon métier. Tout est là.
Le ton de rectitude du jeune homme ne permettait pas de l’attaquer par là. Que faire ? Finalement, le Procureur trouve un chemin :
- Finissons-en une bonne fois pour toutes. Es-tu catholique ?
- Oui, je suis catholique.
Le Procureur demande alors la peine de mort. Francisco a suffisamment de sérénité pour sourire encore. Conformément au protocole le Président du Tribunal l’invite à se défendre. Il répond :
- Ce n’est pas nécessaire, ni utile. Si c’est un délit de se reconnaître catholique, j’accepte bien volontiers d’être un délinquant. En ce monde, le plus grand bonheur pour un homme c’est de mourir pour le Christ. Je donnerais sans hésiter mille vies pour cette cause.
Malgré l’injuste sentence, il retourne à sa cellule en chantant l’hymne des retraitants : «Debout, mes frères, mettons-nous en chemin. Jésus notre Roi marche devant nous…». Il aurait eu la possibilité de commuer sa peine de mort, mais à condition de souscrire un document d’apostasie . Ce qu’il refusa. Il écrivit alors trois lettres d’adieu : à ses sœurs, à sa fiancée et à son Père spirituel. Face au peloton d’exécution, au moment où les armes se lèvent, il s’exclame à voix forte : «Un instant, s’il vous plaît ! Je vous pardonne tous. Et rendez-vous au Ciel». Le 11 mars 2001, Jean-Paul II l’a déclaré bienheureux.
Lettre à ses soeurs et à sa tante
Mes très chères,
On vient de me lire ma condamnation à mort et jamais je n’ai été aussi tranquille que maintenant. Je suis sûr que cette nuit je serai au ciel avec mes parents; c’est là que je vous attendrai.
La Providence divine a voulu me choisir comme victime des erreurs et péchés commis par nous. Je vais à la mort avec plaisir et sérénité. Jamais comme maintenant je n’aurai autant de possibilités d’assurer mon salut.
Ma mission en cette vie s’est achevée. J’offre à Dieu les souffrances de cette heure.
Je ne veux d’aucune façon que vous pleuriez sur moi : c’est la seule chose que je vous demande. Je suis très, très content C’est avec peine que je vous laisse, vous que j’ai tant aimées, mais j’offre à Dieu cette affection et tous les liens qui me retiendraient en ce monde.
Thérèse : Sois courageuse. Ne pleure pas sur moi. C’est moi qui ai une immense chance, dont je ne sais comment remercier Dieu. J’ai chanté au sens propre le «Amunt, que és sols cami d’un dia - Debout, le chemin est court» (hymne des retraitants). Pardonne-moi les peines et les souffrances que je t’ai causées involontairement.
Je t’ai toujours beaucoup aimée. Je ne veux pas que tu pleures sur moi, tu entends ?
Marie : Ma pauvre petite sœur. Toi aussi tu seras courageuse et tu ne te laisseras pas accabler par ce malheur de la vie. Si Dieu te donne des enfants, tu leur donneras un baiser de ma part, de la part de leur oncle, qui les aimera depuis le ciel. Quand à mon beau-frère, je l’embrasse bien fort. J’attends de lui qu’il soit ton aide en ce monde et qu’il sache me remplacer.
Ma tante : En ce moment je ressens une profonde gratitude pour tout ce que vous avez fait pour nous. Nous nous retrouverons au ciel, d’ici quelques années. Sachez les passer en toute générosité. Du ciel celui qui vous aime tant priera pour vous.
Saluez Bastida, Mme Francisqueta, les «didos», Puig, Lopez, les chers compagnons de la Fédération (de jeunes Chrétiens de Catalogne), que je ne veux pas nommer. Vous direz à tous mes amis que je meurs content et que je me souviendrai d’eux dans l’autre vie.
Au Père Galan, S.J., avec qui il avait fait les Exercices spirituels
Cher Père,
Je vous adresse cette lettre après avoir été condamné à mort et quelques heures avant d’être fusillé.
Je suis tranquille et content, très content. J’espère être dans la Gloire dans un moment...
Je rends grâce à Dieu de me donner un genre de mort qui m’offre de grandes probabilités de me sauver.
J’ai un carnet sur lequel je notais les idées qui me venaient (mes inventions). Je vous le ferai parvenir. C’est mon modeste testament intellectuel. Faites attention à ce qui concerne le compresseur à ammoniaque. Le Hg peut être remplacé par n’importe quel autre liquide, en circuit fermé, les valves par des valves métalliques et la pression produite par une simple pompe centrifuge à pression (puis vient un dessin qui illustre cela)...
Je vous suis très reconnaissant. Je prierai pour vous. Mon souvenir à mes amis de Pravia.
Francisco
Lettre à sa fiancée, Maria Pelegri
Chère Marie,
Nos vies s’étaient unies et Dieu a voulu les séparer. Je Lui offre, avec toute la sincérité possible, l’amour que j’ai pour toi, amour intense, pur et sincère.
Ton malheur me fait mal, mais pas le mien. Sois fière : deux frères et ton fiancé. Pauvre Marie ! Il m’arrive quelque chose d’étrange : je ne parviens pas à ressentir de la peine de ma mort. Une joie intérieure, intense, forte, m’envahit entièrement. Je voudrais t’envoyer une lettre d’adieu triste, mais je ne le puis. Je suis tout enveloppé de pensées joyeuses comme d’un pressentiment de la Gloire.
Je voudrais te parler de combien je t’aurais aimé, des tendresses que je te réservais, du bonheur qui aurait été le nôtre. Mais pour moi tout est secondaire. Je vais faire un grand pas.
Je veux te dire cela : si tu peux, marie-toi. Depuis le Ciel je bénirai ton union et tes enfants. Je ne veux pas que tu pleures, je ne le veux pas. Sois fière de moi. Je t’aime.
Francisco.
P.S. : Je n’ai pas le temps d’écrire davantage.
Source :
http://www.cpcr.org/fr2/index.php?option=com_content&view=article&id=26:bienheureux-francois-castello&catid=21:temoignages&Itemid=44