fabrice1961
Date d'inscription : 26/05/2013 Age : 62 Localisation : Côte picarde
| Sujet: Fille ou garçon : même pronom !!! Mar Juin 11 2013, 15:15 | |
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- Fille ou garçon, même pronom
20 mars 2012 à 00:00
Han, hon, hen. Une crèche suédoise tente une expérience radicale : place au neutre, le «il» et le «elle» sont bannis. Par ANNE-FRANÇOISE HIVERT Correspondante en Suède
A Egalia, une crèche municipale dans le quartier bobo de Södermalm, à Stockholm, les enfants ne jouent pas avec des bonshommes en Lego, mais avec des «personnages». Il n’y a pas d’un côté les filles et de l’autre les garçons : «Ici, on dit "les enfants" ou bien "les copains"», raconte la directrice, Lotta Rajalin. Et surtout, dès que possible, on utilise hen : un pronom sexuellement neutre, intraduisible en français, qui remplace han («il») ou hon («elle»). Dans les chansons, dans les livres… «Hen nous permet, par exemple, de parler d’un policier ou d’un astronaute, sans qu’on n’associe immédiatement la profession à un genre spécifique», explique la directrice.
Mais si les parents sont prêts à patienter des mois pour faire entrer leurs rejetons à Egalia, la pédagogie qui y est pratiquée est loin de faire l’unanimité en Suède. Insultes, menaces… Le personnel a même reçu un colis contenant deux poupées, une fille et un garçon, dont le sexe avait été mutilé. Lotta Rajalin s’insurge : «Nous ne nions pas l’existence du sexe biologique de l’enfant. Nous disons seulement que nous sommes tous des individus très différents et que les enfants ne doivent pas se sentir limités par leur genre.»
«Stratégies». Le débat en Suède bat son plein : a-t-on vraiment besoin d’un troisième pronom ? Est-ce aller trop loin dans le désir d’une société égalitaire ? Hen a été créé dans les années 60 par un journaliste las de recourir à la formule peu élégante «il/elle». Depuis, son usage est resté limité. Vio Szabo, 26 ans, est un de ceux qui revendiquent le droit de l’utiliser. Né femme, Vio, qui plaide pour la reconnaissance d’un «troisième sexe», ne s’identifie à aucun des deux genres. «Hen me permet de communiquer que je suis un être humain à part entière, et pas seulement une moitié, homme ou femme.»
En 2005, le Conseil des langues (Sprakradet), chargé de suivre l’évolution du langage en Suède, a provoqué l’indignation de la communauté queer en prenant parti contre l’usage du troisième pronom. Coup de théâtre en janvier : le conseil revient sur ses positions. «Nous continuons de penser qu’il vaut mieux utiliser d’autres stratégies, comme il/elle ou bien la forme passive, mais nous n’interdisons à personne de l’utiliser, et nous pensons même qu’il est respectueux de le faire quand quelqu’un qui ne se reconnaît dans aucun des deux genres le demande», explique l’inspectrice Susanne Carlsson.
A l’origine de ce retournement, la publication, en début d’année, de deux livres qui ont placé le pronom sous le feu des projecteurs. Un ouvrage pour adultes, d’abord, où l’auteure, Asa Maria Kraft, raconte une histoire d’amour entre deux hen. Un livre pour enfants, ensuite, qui relate les aventures de Kivi, petit héros ou héroïne en pyjama rayé blanc et vert, bonnet de nuit informe, et grosses lunettes rouges, dont on ne connaîtra jamais le sexe. Karin Salmson, directrice de la maison d’édition Olika, explique : «Nous voulions écrire un livre où l’enfant est un enfant, pas seulement une fille ou un garçon. L’utilisation de "il" ou "elle" s’accompagne de stéréotypes sur les compétences de chacun. Hen permet de s’en échapper.» Face aux critiques provoquées par la publication du livre, elle réagit : «Nous ne voulons pas faire disparaître le sexe biologique, ni instaurer un monde sexuellement neutre, où les filles ne pourraient plus s’habiller en rose et les garçons jouer aux voitures. Nous disons seulement que chacun doit pouvoir être celui ou celle qu’il veut, peu importe son genre.»
«Confusion». Sur la Toile, les commentaires vont bon train. Asa Carlsson, blogueuse «libérale», critique une «expérimentation menée sur une génération entière d’enfants» qui pourrait avoir des conséquences dévastatrices. Car, écrit-elle, «notre sexe dit certaines choses de notre identité, et c’est la raison pour laquelle c’est une information importante à donner, même si cette information seule, bien sûr, ne dit pas tout sur l’individu en question». L’auteure de livres pour enfants Anette Skahlberg est elle aussi en colère. Elle vient d’ailleurs de publier un ouvrage dans lequel elle raille l’invention du troisième pronom en en créant quatre nouveaux : «hun»,«hin»,«hån» et «hyn». Selon elle, «hen n’a rien à voir avec l’égalité des sexes». Au contraire : «La discussion ressemble un peu aux habits neufs de l’Empereur.» L’instauration d’un nouveau mot risque, dit-elle, de faire oublier que les inégalités demeurent, tout en plongeant les enfants dans «la confusion et l’incompréhension».
Ces dernières années, plusieurs couples suédois ont fait sensation en annonçant leur intention de ne pas révéler le sexe de leurs enfants. Récemment, Linus, père de Sasha, 2 ans et demi, et Nicki, 6 mois, racontait dans le quotidien Dagens Nyheter être partisan d’une éducation «sexuellement neutre». Explications : «Nous voulons offrir à nos enfants une palette de choix aussi large que possible, de façon qu’ils ne se sentent pas limités par le genre que la norme fixée par la société leur attribue.»
Le psychologue Philip Hwang ironise sur ces pratiques très «politiquement correctes», adoptées par un «petit groupe de gens qui vivent dans des grandes villes et veulent que leurs garçons puissent aller à l’école en robe sans qu’on se moque d’eux». Il évoque des risques : «Cela peut devenir problématique pour un enfant, très tôt conscient de son sexe, quand les parents utilisent hen et refusent de dire "il" ou "elle", puisqu’ils marquent ainsi qu’ils ne voient aucune différence entre les filles et les garçons, ce qui n’est pas le cas de l’enfant.» L’important, dit-il, ce n’est pas le vocabulaire, mais les actes : «Un père qui reste à la maison, par exemple, quand la mère va travailler.»
La directrice d’Egalia rejette les critiques. Elle assure que les enfants «jouent bien mieux ensemble» que dans les crèches traditionnelles et qu’ils sont «beaucoup plus sûrs d’eux» que leurs camarades du même âge. Pour Nyamko Sabuni, ministre de la Parité, «il ne reste plus qu’à espérer que ce soit une façon nouvelle et inédite de parvenir à l’égalité des sexes».
http://www.liberation.fr/vous/01012396989-fille-ou-garcon-meme-pronom
Non, non, vous ne rêvez pas !!! | |
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