Le credo protestant face à la crise03 Décembre 2010
DEPECHES CATHOBEL - BELGIQUE - Bruxelles
Le 2 décembre, le Service protestant d'éducation permanente (Spep) organisait un colloque à l'Hôtel de Ville de Bruxelles. Au centre de cette journée, une question: la crise est-elle porteuse d'enseignements nouveaux ?
Pas de chance pour le Pep ! La neige et le froid, qui a frappé la majeure partie de l'Europe, avait empêché le Dr. Christoph Stückelberger, professeur d'éthique à la faculté de théologie protestante de l'université de Bâle de rejoindre Bruxelles pour ce colloque de grande qualité qui réunissait également de nombreuses sommités belges de la finance. Heureusement, les technologies de l'informatique et d'internet réunies lui ont permis de faire entendre sa voix sur "l'éthique et la finance".
Crédit, CredoSelon ce professeur, la crise actuelle est un ensemble de 8 crises partielles: une crise américaine, financière, économique et pour finir politique auxquelles se sont ajoutées des crises de confiance, de valeurs mais également une crise spirituelle, une crise des sciences (économiques en particulier) et au bout du compte, conséquence de tout le reste: une crise sociale. Voilà comment on aboutit à ce que l'on appelle une crise systémique (une crise du système).
"L'interdépendance de ces 8 crises est visible dans notre langue" a-t-il alors souligné en rapprochant le mot crédit à ceux de crédibilité et de credo. Et d'ajouter que cette crédibilité doit être basée sur le long-terme, l'honnêteté, la confiance. Or en 2007-2008, les banques ne se faisaient même plus confiance entre elles !
Il faut donc désormais transformer le cercle vicieux de l'avidité en un cercle vertueux, mais cela ne peut se faire, selon le théologien suisse, que si l'on base l'économie sur des valeurs fortes, des valeurs spécifiques au christianisme. Et c'est à partir de ces valeurs qu'il faut juger les politiques.
La première de ces valeurs est l'équité, et l'économie doit être au service de cette équité. Mais cette équité doit aussi être liée à la liberté. Il faut alors trouver la juste mesure, en ayant à l'esprit que communisme et ultra-libéralisme ont été deux échecs économiques patents...
Troisième valeur: la durabilité, dans ses aspects écologiques, sociaux, culturels. "Dieu n'a pas fait le monde pour qu'on le laisse être détruit par l'homme mais pour que ce dernier le transmette aux générations futures", a rappelé le Dr. Stückelberger.
Autres valeurs à mettre en oeuvre: l'orientation vers le bien commun (là encore il s'agit de trouver un équilibre entre liberté de l'individu et individualisme) et la solidarité. "Un système économique n'est pas durable si l'écart entre les plus riches et les plus pauvres se creuse sans cesse. Dieu est un dieu d'inclusion, pas d'exclusion, et qui respecte la diversité".
A tout cela, il faut enfin ajouter la responsabilité. L'économie, ce n'est pas "après-moi le déluge..." a dit en substance le professeur d'éthique en précisant que "le chrétien se sent responsable devant Dieu qui lui a donné ses capacités physiques, intellectuelles, émotionnelles, et de foi."
Des règles honnêtes pour une économie équitableOn pourra trouver le point de vue protestant sur ces récentes crises financières et des propositions concrètes sur le site
http://www.sek-feps.ch/. Le Dr. Stückelberger ne les a pas développées mais a apporté quelques précisions. Selon lui, l'éthique individuelle ne suffit pas. Il faut d'autre part dépasser les discussions idéologiques et mettre l'humain au centre, agir en fonction de ce qui est utile au plus faible. De plus, la finance doit être au service de l'économie réelle et en particulier de l'économie des biens de subsistance. Enfin, le professeur bâlois a prôné une formation à l'éthique dans les écoles de management.
Rêve de théologien ou encouragement à ne pas être fataliste ?
Ctb/PG